lundi 14 janvier 2008

Bambane avec l'Esprit Canut

Bambane avec l’Esprit Canut

En décembre 2005, l’association L’Esprit Canut m’a demandé d’accompagner par des commentaires une déambulation, la marche des chelus, du nom de la lampe qu’utilisaient les tisseurs pour travailler la nuit, à travers la Croix-Rousse. Une manifestation à laquelle ont participé plusieurs associations.

Place Joannès Ambre
Nous sommes le 8 décembre 1852 … Depuis le 24 mars la Croix-Rousse n’est plus une ville indépendante mais un arrondissement de Lyon… comme Vaise, comme la Guillotière qui s’étend des marais des Brotteaux aux lônes de la Mouche et Gerland. La Croix-Rousse essuie encore ses plaies sanglantes provoquées par les affrontements entre les héritiers de Chalier, partisans d’une République vertueuse à la façon de Robespierre, les Voraces, et la troupe, le 15 juin 1849. De 30 à 100 morts. En cette année 1852 les Croix-Roussiens pensent à autre chose. On leur a promis depuis l’année passée, une Vierge de l’Immaculée Conception, haute de 5 mètres et revêtue d’une épaisse couche d’or. Une œuvre assez simple, sans détails qui ne seraient pas visibles à cette hauteur. Le gone chargé de la sculpter s’appelle Joseph Hugues Fabisch, il est professeur à l’Ecole des Beaux-Arts. Il va devenir un spécialiste des Vierges puisqu’on lui confiera plus tard celle de Lourdes et celle de la Salette. Le travail de la fonte du bronze est confié aux ateliers Lanfrey et Constant Baud, des Lyonnais, installés du côté du Vieux Lyon, au bord de la Saône. Ils doivent livrer le 8 septembre, jour le fête de la Vierge, mais y a eu des problèmes. Le boulot prend du retard, des inondations paraît-il… Alors ça sera le 8 décembre, une date qui rappelle le vœu des échevins de 1643. On a prévu une couronne de fusées aux étoiles bleues et blanches et les Lyonnais se pressent vers Fourvière. Seulement voilà… le ciel se déchaîne… c’est la tempête et le matériel d’illumination ne peut être posé. Les édiles de la ville annulent l’éclairage, se mettent au chaud en vidant le buffet préparé et discutent de choses et d’autres…
Pensez les fenottes et les gones d’en bas, y sont déçus. On leur avait promis un feu d’artifice et rien. C’est tout sombre en haut de Fourvière qui n’a pas encore la basilique. On ne voit même pas la Vierge plaquée d’or. Et voilà qu’apparaissent sur les fenêtres, une, puis dix, puis cent, puis mille bougies ! Des somptueux quartiers comme des immeubles ateliers des Canuts… y en a partout ! Deux ans avant le dogme de l’immaculé Conception fixé au 8 décembre, les Lyonnais célèbrent Marie et depuis… ça continue…

Eglise Saint-Denis
Nous sommes en 1624. Les Croix-Roussiens et les habitants de Cuire sont plutôt contents. C’est que chenuses fenottes et bons gones, depuis le temps qu’ils réclamaient un lieu de culte, c’est aujourd’hui chose faite. C’est comme aujourd’hui pour des salles de réunions, des espaces verts, voir des parkings… y faut réclamer sans relâche, savoir être patients sans se décourager. C’est ce qu’ils ont fait les chrétiens du XVIIème siècle de Cuire-la Croix-Rousse. Les moines Augustins Réformés qui avaient été accueillis en France par Louis XIII, ils ont retroussé leurs manches de leurs robes en bure, craché dans leurs mains et construit une chapelle et un couvent. Comme il faut laisser le temps au temps, 90 ans plus tard on consacre la chapelle qui sensément avant ça, n’était pas tout à fait aux normes spirituels. On se gratte un peu le cotivet pour savoir qu’elle nom on va lui donner. Un gone plus futé que les autres ou qui avait lu les bouquins du père Bobichon lève le doigt : « belins belines (en fait il n’a dit que belin parce que d’après ce qu’on dit les femmes n’avaient guère la paroles à cette époque) il dit donc le gone futé : « Belins, y a qu’à dédier la chapelle à Saint-Denis, vu qu’il fut un des bonhommes convertis par Saint-Paul à Athènes et comme, vous me suivez, l’évêque de Marquemont qui avait accueilli les Augustins à Lyon, son petit nom c’est Denis… y va être tout joye le monseigneur et par les temps qui coure vaut mieux avoir des sponsors à la hauteur ! » A la Révolution, les Croix-Roussiens font comme les autres, ils écrivent sur des cahiers d’écoliers tout leurs rouspétances et notamment ils demandent que la chapelle devienne église paroissiale sous le vocable d’église Saint Augustin en souvenir des moines. Seulement c’est une période très agitées et aussi sec, on transforme St Augustin et on donne à ce lieu le nom beaucoup plus révolutionnaire de « temple décadaire ». Aucun succès. Alors on essaie « temple de la Raison ». Pas mieux. En définitive, on revient au vocable de St Denis et sa fonction d’église. Les canuts qui arrivent à la Croix-Rousse à partir de 1810 offriront une bannière encore visible aujourd’hui. Témoin de la tolérance des Croix-Roussiens, l’Amicale Laïque réside dans les anciens locaux du monastère depuis plus de 100 ans !

Angle Grande Rue – rue du Chariot d’Or
La Grande Rue, notre plus ancienne voie, est bordée de part et d’autre de maisons qui sont comme autant de témoins de l’histoire de la Croix-Rousse. Son dynamisme économique n’est pas à prouver et il en a été toujours ainsi. Normal quand on sait qu’au sud, elle se termine par la place de la Croix-Rousse qui fait face à la porte d’accès à Lyon. Elle est fermée la nuit cette porte. Les voyageurs, les marchands doivent pouvoir se restaurer, dormir en attendant de pénétrer dans la ville de Lyon. De chaque côté de la Grande-Rue, des auberges, des mécaniciens qui réparent les charrettes, les chariots, les diligences qui ont souffert pendant les longs trajets. Certains aubergistes astucieux font comme à Lyon, ils accrochent à leurs portes cochères, un fagot de branchages signalant ainsi qu’il est possible de « bouchonner » les chevaux… On désignera ces lieux hospitaliers, où la cuisines est excellente… les bouchons, tout simplement. Autre avantage de la Grande-Rue de la Croix-Rousse, tout y est moins cher… Opération commerciale… ??? Peut-être mais surtout les octrois, les taxes y sont moins importantes qu’à Lyon. D’ailleurs le bourgeois lyonnais ne s’y trompe pas et vient le dimanche et les jours de fêtes carillonnées s’encanailler à la Croix-Rousse et se rincer le corgnolon sans vergogne dans l’auberge du Chariot d’Or par exemple... Et puis c’est la campagne tout autour de la Grande-Rue. A l’ouest les propriétés religieuse, à l’Est, des vignes, des jardins et quelques propriétés de Lyonnais. Leurs maisons de campagne, leurs gloriettes… Mais au début du XIXème siècle, tout va changer… on va le voir plus loin… suivez moi…

Place Bertone
L’ancienne place de la Visitation… et la première école de tissage… Les canuts, comme les imprimeurs savent lire et écrire, envoient leurs enfants à l’école. N’ont-ils pas créé leur premier journal, l’Echo de la Fabrique, en 1831 quelques semaines avant leur révolte. Ils lisent, discutent, écrivent. Le savoir est un bien précieux pour eux. Mettre sur pied le mutuellisme, les épiceries sociales nécessitent cette maîtrise du calcul, de la phrase, de l’argumentation. Plus près de nous, un autre gone qui habitait à deux pas d’ici, écrira du fond de sa cellule, une page combien émouvante… C’est Marcel Bertone, jeune militant communiste… il s’adresse à sa fille…

« Ma petite Hélène. Lorsque tu liras cette lettre ton petit cerveau commencera sans doute à comprendre la vie. Tu regretteras de ne pas avoir à tes côtés ton papa et ta maman. Mon Hélène, tu dois savoir un jour pourquoi ton papa est mort à vingt et un ans, pourquoi il s’est sacrifié, pourquoi il a fait semblant de t’abandonner… Ma petite Hélène, il est deux heures, il faut être prêt. Il faut me dépêcher… Apprends à connaître les raisons pour lesquelles je suis tombé. Apprends à connaître ceux qui t’entourent et juge les gens non d’après ce qu’ils te diront, mais d’après ce que tu les verras faire…Aie l’esprit de sacrifice pour les choses nobles et généreuses. Ne te laisse pas arrêter par les choses qui paraîtront te convaincre que ton sacrifice est vain, inutile… Si dans la vie tu ne connais pas la richesse, console-toi en pensant que là ne se trouvent pas les sources du vrai bonheur. Choisi un honnête travailleur pour mari. Choisis-le généreux, aimant travailler, capable de t’aimer. Ma fille, en pensée, je t’embrasse. On ne nous a pas accordé l’autorisation de nous voir. Peut-être cela vaut-il mieux ? Adieu Hélène, ton papa est mort en criant : « Vive la France »
Fait à la prison de la Santé, le 17 avril 1942, date de mon exécution. Marcel Bertone.
Ne baisse pas la tête parce que ton papa est fusillé. »


Angle rue du Chariot d’Or – rue Dumont D’Urville
Les fils d’or, d’argent et de soie sont exclusivement tissés à Lyon depuis 1536. A Lyon… pas à la Croix-Rousse. Du côté de Saint-Jean, Saint-Georges, Saint Paul et montée de la Grande Côte. Seulement voila-t-y pas qu’un gone, Joseph Marie Charles dit Jacquard vers 1805, invente pour le tissage, un système de cartons perforés assurant mécaniquement la levée des fils de chaîne permettant selon le décor voulu, le passage des fils de trame lancés par le tisseur au moyen d’une navette. Entre nous cette amélioration va entraîner la suppression d’un emploi, celui du tireur de lacs, et ne sera réellement utilisé que sous la Restauration. N’empêche, si les canuts veulent être compétitifs il faut qu’ils utilisent cette nouvelle mécanique qui se place au dessus du métier. Les ateliers du Vieux Lyon ont des plafonds trop bas. Il faut plus de 4 mètres. Le haut des pentes et le plateau Est de la commune de la Croix-Rousse sont peu construits. A l’Ouest, des propriétés religieuses. Ce n’est pas là que l’on va construire. Par contre au levant, des jardin, des vignes, de petites propriétés bourgeoises, des maisons de campagnes, les gloriettes. On peut acheter et construire très rapidement des immeubles-ateliers. De hautes fenêtres, sur les vitres du papier collant pour que la lumière soit diffusée mais que les rayons du soleil ne viennent pas décolorés les fils teints. Pas de balcon, par de chapiteaux ou d’embellissement de la pierre…c’est une architecture d’usine. A l’intérieur les métiers mais aussi une alcôve pour le chef d’atelier et sa fenotte, le chef d’atelier c’est le canut propriétaire des moyens de production. A mi-hauteur un plancher pour que les compagnons, les apprentis et les enfants du couple puissent dormir… la soupente… aujourd’hui mezzanine.

Place Bellevue
1865… Depuis 13 ans la Croix-Rousse est Lyonnaise… mais nom d’un rat c’est pas très pratique d’aller à Lyon… c’est que les remparts, plus ou moins détériorés par les différentes révoltes sont encore bien présents. Avec à l’Ouest le fort St Jean, sur le bords de la Saône et à l’Est, le fort St Laurent. On va les démolir les remparts et il ne restera plus que la porte du gymnase militaire, derrière la poste, sur le terrain du Crédit Lyonnais, et les deux forts, dont celui-là. Construit comme les immeubles ateliers avec la pierre de la carrière de Couzon, la même pierre que la croix de couleur orangée… de couleur rousse, érigée à la fin du XVème siècle… eu nord de la commune à la limite de Caluire. C’est elle qui va donner son nom à l’ensemble de la paroisse, de la commune, de la colline. Les immeubles ateliers que nous allons longer jusqu’à la place Colbert ont été témoins des combats des révoltes… pendant trois jours.
Marceline Desbordes Valmore, poétesse était là…

« Quand le sang inondait cette ville éperdue,
Quand la tombe et le plomb balayant chaque rue
Excitaient les sanglots des tocsins effrayés,
Quand le rouge incendie aux longs bras déployés,
Etreignait dans ses nœuds les enfants et les pères,
Refoulés sous leurs toits par les feux militaires,
J’étais là ! Quand brisant les caveaux ébranlés,
Pressant d’un pied cruel les combles écroulés,
La mort disciplinée et savante au carnage,
Etouffait lâchement le vieillard, le jeune âge,
Et la mère en douleurs près d’un vierge berceau,
Dont les flancs refermés se changeaient en tombeau,
J’étais là : j’écoutais mourir la ville en flammes ;
Savez-vous que c’est grand tout un peuple qui crie !
Savez vous que c’est triste une ville meurtrie,
Appelant de ses sœurs la lointaine pitié,
Et cousant au linceul sa livide moitié,
Ecrasée au galop de la guerre civile ! »


Place Colbert et la cour des Voraces
Mort à la fin du XIXème siècle, Nizier de Puitspelu nous parle des Voraces. « Ca date de 1846. Pas de but politique au départ. Quelques ouvriers canuts voyant que les cafetiers de la Croix-Rousse ne pouvaient se résoudre à servir le vin au litre, se liguèrent pour obtenir cette réforme. Ils se rendaient par petits groupes dans les cafés et demandaient un litre de vin. Le patron répondait invariablement : Nous ne servons qu’à la bouteille. » Les canuts de sortir et d’aller dans un établissement voisin renouveler l’expérience. D’où le nom de Voraces.
Ce fut là le début de cette société absolument distincte des autres organisations ouvrières du quartier, des Ferrandiniers et des Mutuellistes. Le Voraces commencèrent à se réunir périodiquement chez Mme Maréchal, à l’angle de la rue Austerlitz et du Mail. Le samedi et le lundi. Au début de 1848 quelques canuts politisés décidèrent d’admettre dans ces réunions que des républicains. 300 à la chute de la Monarchie de Juillet.
Le 24 février ils descendent à Bellecour sans armes, sans uniforme, pour s’emparer du poste. Puis ils se rendent à l’Hôtel de Ville dont ils font le siège. Ils donnent l’assaut à coup de pierres. Ils deviennent maîtres de l’Hôtel de Ville. Puis à la Préfecture (Place des Jacobins) Tout cela dans la soirée. Le lendemain ils se rendent au fort St Laurent. Ils prennent les armes. Puis ils s’emparent du séminaire du bas de la côte St Sébastien. Puis le bastion en face du Mont Sauvage. (2 tués)
Ils tiennent le bastion des Bernardines, le fort de Montessuy, le fort St Laurent, le Palais de Justice.
Le 18 mars Arago vient à Lyon. Il les persuade qu’il ne vient pas pour renverser la République. Les Voraces se retirent des forts. Les sociétés disparaissent.

Le Boulevard de la Croix-Rousse
Le boulevard de la Croix-Rousse… c’est d’abord l’étrange bruit des étals dans la nuit usée par sa veille. Le geste machinal qui installe par habitude les tréteaux, soulève les cagots de légumes, aligne les rondeurs brillantes des fruits sous la lumière épuisée d’un réverbère. Le silence se déchire en gémissant dans la clarté hésitante du matin. Les rêves ont fait le voyage et cherchent encore à poursuivre leur brève existence. Le peuple des maraîchers met en place le décor d’une matinée qui reste encore tapis dans les coulisses.
Un juron claque sur l’asphalte. Un éclat de rire le relève, suivi d’un mot qui vient réveiller les bonjours qui tardaient à se manifester.
Le soleil n’est pas en reste. Comme s’il n’attendait que ce signal, il tend le bras pour flatter la verve du peuple du boulevard. Les conversations s’imposent, passent d’un banc à un autre, se croisent, se heurtent parfois et rebondissent sans toujours se relever.
Les ardoises se couvrent de chiffres, les balances se redressent, une tomate malade qui s’était glissée en douce pour réchauffer sa vieille peau est expulsée sans ménagement, un bataillon de plantes aromatiques distribue des rêves de vacances, les regards des premiers clients s’attardent, hésitent, comparent.
C’est ainsi que le peuple du boulevard peu à peu se retrouve. Par touches successives, suivant un rite immuable, maraîchers et chalands transforment le boulevard de la Croix-Rousse en un théâtre de la vie. Point de dialogues écrits ciselant les répliques, point de répétition réglant le mouvement lent des uns, la déambulation saccadée des autres et pourtant chacun tient sa place. Tout en innovant, tout en créant des scènes improbables, des dialogues qui échappent aux bibliothèques poussiéreuses, aux anthologies poétiques.
Quand le soleil débarrassé des brumes qui voilent son regard, s’accoude d’un air gourmand à la terrasse d’un nuage, le mouvement s’amplifie et mêle dans un désordre rassurant les habitants que la vie aurait dû séparer.
Le peuple du boulevard sait des jours de pluie. Quand le marché s’étire avec peine sur le bitume luisant. Quand les gouttes s’amusent à rebondir de la bâche qui pleure à la joue du gamin. Le vent s’invite aussi à ces matins de deuil. Il gifle l’étal, défeuille les platanes, courtise les parapluies à la hussarde, et repart hilare, content de lui
Le peuple du boulevard se sépare, peu à peu. Quelques choux-fleurs tendent la main à des mains fatiguées qui guettent quelques espoirs. La misère n’ignore pas le marché.

Place des Tapis
Le boulevard… c’est la vogue de la Croix-Rousse… S’il est difficile de préciser la date exacte de sa création, on peut la situer à l’époque de la construction par les Augustins en 1624 de l’église dédiée à l’évêque Denis de Marquemont. Or la saint Denis se fête le 9 octobre, époque de la récolte des marrons et du premier vin blanc peu fermenté et les paroissiens ont décidé de célébrer le saint patron. Au fil du temps elle est devenue vogue. Quand à sa configuration, voilà un témoignage d’un ancien, rédigé à la fin du XIXème siècle.
« Toute la Grande-Rue était encombrée de faiseuses de matefaims, de marchands de pâtés aux poires cuisse-dame ou aux brignoles, et de rissoleurs de marrons ; car vous n’ignorez pas que la vogue de la Croix-Rousse est en possession de privilège immémorial d’offrir aux promeneurs les premiers marrons de la saison et le premier vin blanc – l’un, sans doute, corrigeant l’autre. Sur la place, c’était une cohue dont on ne peut se faire une idée, en se rappelant que le boulevard n’existait pas et que tout était massé sur le marché (petite place de la Croix-Rousse) et l’étroit carré où s’élevait la croix. A peine quelques baraques perdues s’aventuraient à l’entrée du cours des Tapis. De tradition, le cirque était toujours dressé contre le gymnase militaire et M. Roque, « physicien du roi », trônait le long du rempart. »
Le boulevard… c’est aussi les funiculaires… les ficelles et celle de la croix Pâquet… qui nous offrit le Gros Caillou… la ficelle Croix-Pâquet et le dernier voyage d’homme libre de Jean Moulin
21 juin 1943 : Tony de Graff amène le colonel Schwarzfeld à la Ficelle Croix-Pâquet où celui-ci retrouve Raymond Aubrac et Jean moulin. Aubry, Hardy et Lassagne prennent la ficelle au environ de 14 h place Croix-Pâquet. Ils arrivent à la gare supérieure (aujourd’hui le petit terrain de sport à l’angle de la rue Vaucanson) et se rendent place de la Croix-Rousse. Aubry et Hardy prennent le tram 33 en direction de Caluire. André Lassagne est à bicyclette. Vers 14 h 30, C’est au tour de Jean Moulin et Aubrac de prendre la ficelle. Au terminus ils attendent une demi-heure le colonel Schwarzfeld et se rende chez Dugoujon.
Arrive un peu plus tard, la gestapo…

Ainsi s’achève la marche des chelus chantant… Nous allons rejoindre la place de la Croix-Rousse et continuer à chanter. Avant de me taire, avant que vous entonniez le chant qui ici nous est si cher, celui des Canuts, une chose encore. Il est arrivé que certains s’interrogent et ce demande s’il était convenable d’utiliser le mot de Canut qui paraît-il serait injurieux à l’égard des maîtres tisseurs. En 1832, les tisseurs se posaient déjà la question et l’Echo de la Fabrique organisait un grand concours pour trouver une autre appellation. Mais dans le courrier reçu à la rédaction du journal des ouvriers en soie, une lettre qui devrait aujourd’hui régler une fois pour toute ce problème :

« J’ai cru, Monsieur, que c’était une plaisanterie que votre concours ouvert pour trouver un nom euphonique, dites-vous, à la classe générale des ouvriers en soie. Je vois avec peine que vous y persistez : pourquoi donc, enfants ingrats, rougirions-nous du nom que nos pères nous ont laissé ! Pourquoi cette susceptibilité, pour mieux dire, cette pruderie ? Qu’a donc de déshonorant le nom de canut ? Qu’importe que ce soit par raillerie ou autrement qu’on nous le donne ? Par lui-même un mot n’a rien de fâcheux.
Appelons-nous canuts et soyons citoyens.
Votre concours à mon avis est inutile, et son but est oiseux ; ce n’est pas de trouver un nom à notre profession qu’il faut vous enquérir, permettez-moi de vous le dire, mais bien des améliorations à notre état social. Je me suis laissé dire que dans une ville qu’on appelait Byzance, et qui était assiégée par une armée ennemie, des moines qui l’habitaient discutaient gravement une question théologique ; pendant ce temps l’ennemi prit la ville, et les moines allèrent en esclavage continuer leur lumineuse discussion. Sans remonter à une époque éloignée, sous le consulat de Bonaparte, on discuta beaucoup sur l’importance relative des mots citoyens et Monsieur ; et pendant ce débat, la république périt Serions-nous, par hasard, à notre insu, dans une position analogue.
Je vous propose donc de fermer une discussion au moins intempestive, et de chercher au contraire à rendre au nom de canut toute la gloire qu’il mérite, étant porté par des hommes probes et laborieux.
Intitulez-vous hautement journal des canuts, on en rira d’abord, ensuite on s’y accoutumera ; ce nom deviendra aussi noble que celui de banquier, médecin, avocat, etc., et vous aurez fait un acte de haute sagesse. »
Labory.


Robert Luc le 8 décembre 2005

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