dimanche 30 décembre 2007

Les canuts et la poésie

Le 25 octobre 1831, les délégués des négociants et les délégués des canuts signent les nouveaux tarifs, tarifs plus complets et augmentés. C'est la joie chez les canuts. Une joie qui se manifeste aussi par des poèmes comme celui d'Antoine Vial :

"LE VINGT-CINQ OCTOBRE 1831.
Air du bon Pasteur (de Béranger).

Lisette, ma douce amie
Pare ton corset de fleurs
Dieu, protégeant l'industrie
Vient de finir nos malheurs.
Tu ne seras plus pauvrette
Allons ! Reprends ta gaîté
Chante avec moi, bonne Lisette
Chante vive la liberté !

Autrefois, sous nos vieux maîtres
Le magistrat orgueilleux
Fier de ses nobles ancêtres
Aurait repoussé nos voeux :
Aujourd'hui, sans étiquette
L'artisan est écouté
Chante avec moi, bonne Lisette
Chante vive la liberté !

Riante apparaît l'aurore
Plus de chagrins, de soucis
Je me réjouis encore
Du bonheur de mes amis
Du travail, une couchette
Puis vient la prospérité
Chante avec moi, bonne Lisette
Chante vive la liberté !

N'écoutant point le caprice
D'un financier courtisan
Désormais on rend justice
En faveur de l'artisan
Peut-être un riche regrette
Mainte vieille autorité
Chantons toujours, bonne Lisette
Chantons vive la liberté !

Vois-tu mes amis, mes frères
Fiers de porter ce drapeau
Autour de couleurs si chères
Ne former qu'un seul faisceau !
En vain viendrait la tempête
Le Français est redouté
S'il peut chanter, bonne Lisette
Chanter vive la liberté !

A.V."

A l'énoncé des résultats des accords, des négociants, minoritaires mais qui sont les plus importants, faisant travailler un grand nombre de canuts, vont refuser les nouveaux tarifs. C'est ce qui déclanchera le mouvement du 21 novembre. Le 1er novembre, date à laquelle les nouveaux tarifs doivent entrer en application... rien. Antoine Vial reprend sa plume...

"A MA LISETTE.

(2me chanson.)
Air du bon Pasteur (de Béranger.)

Ma Lisette, ô toi que j'aime !
Quel sort, hélas ! Te poursuit !...
Tu crus au bonheur suprême
Ce bonheur s'évanouit
Des grands la voix indiscrète
A prédit un prix nouveau
Tisse toujours, bonne Lisette
C'est l'étoffe de mon drapeau.

Ce bleu, sans aucun nuage
Semble l'azur de tes yeux
Ce rose est la douce image
De tes attraits merveilleux
Ce blanc, qu'un noble regrette
Entre deux est assez beau
Tisse toujours, bonne Lisette
C'est l'étoffe de mon drapeau.

On trompe ton espérance ?
Sois riche de mes amours !
Gagne peu, mais sers la France
Et je t'aimerai toujours
Le guerrier, sous son aigrette
Mettra ce léger réseau
Tisse toujours, bonne Lisette
C'est l'étoffe de son drapeau.

Que de goût et que d'adresse
Lise, dans ce que tu fais
Ce tissu, que ta main presse
Me rappelle nos hauts faits
De ton père c'est la fête ?
J'en veux parer le tombeau
Tisse toujours, bonne Lisette
C'est l'étoffe de son drapeau.

Allons ! Chante, mon amie
Chante un meilleur avenir
Ne crains point ce noir génie
Qui semble nous désunir
La liberté, sur sa tête
A secoué son flambeau
Tisse toujours, bonne Lisette
C'est l'étoffe de mon drapeau.

A. Vial

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