Cinquième journée
Dimanche 13 avril à 8 heures une proclamation du préfet Gasparin permet la circulation dans les rues.
Le drapeau noir flotte toujours sur Saint Polycarpe et il y a des fusillades dans ce secteur. Des groupes de républicains occupent la montée de la Boucle, le faubourg de Bresse (sic) et le plateau de Fourvière.
A 11 heures la liberté de circulation est retirée. Beaucoup de Lyonnais vont rester coincés dans les allées.
A 12 h 30 le commandant du génie, Million, conduit une colonne d’attaque sur Fourvière par La Mulatière et Sainte Foy. A 16 h 30 le drapeau noir est abattu. Le quartier de Saint-Georges qui résistait fait sa soumission dans la soirée.
Il ne reste plus que la Croix-Rousse et le faubourg de Bresse. Le général Fleury adresse une dernière sommation. Pas de réponse. « Il emploiera la force et malheur aux vaincus ! (J-B Monfalcon).
Sixième journée
Lundi 14 avril Fleury et le colonel du 27ème sont de bonne heure sur la route de Caluire, à l’extrémité du faubourg et disposent de forces importantes. Un cordon de troupes enveloppe la Croix-Rousse. Les insurgés demandent à parlementer. Aucune concession ne leur saura faite. Deux compagnies se sont portées sur un clos situé hors des portes de Saint-Clair et dans lequel se trouve une maison tenue par les républicains. La maison est emportée à la baïonnette. Les insurgés cherchent à fuir mais ils sont acculés par les soldats et fusillés ou fait prisonniers. Plusieurs sont amenés à la prison de Perrache. 8 ou 10 soldats sont été grièvement blessés et leur tambour a été tué. La soumission de la Croix-Rousse n’est complète que le mardi 15 avril à 12 heures.
L’église Saint Polycarpe a été évacuée à 7 heures du matin.
Mardi 15 avril le conseil municipal se rassemble et vote un remerciement aux troupes de la garnison.
Notes :
Le bilan des morts d’après Claude Latta : 131 militaires et 190 civils.
Le bilan d’après Monfalcon : « Le chiffre des morts et des blessés qu’ont publié les journaux de Lyon, d’après de prétendus états officiels, n’est point exact. Celui que je donne est le résultat du dépouillement des tableaux qui m’ont été communiqués par le président de l’administration des hôpitaux civils ; j’ai eu de plus, communication des états des blessés et morts dressés sur des pièces officielles à l’état-major de la place, régiment par régiment ; enfin, j’ai fait, même à plusieurs reprises, pendant et après le combat, des visites dans les hôpitaux civils et militaires.
Voici un résumé officiel de l’état de situation au 31 mai des individus apportés morts ou vivants à l’Hôtel Dieu par suite des événements d’avril. Chiffre total : 218.
Apportés morts............................................................90
(46 n’ont pas été reconnus)
Sortis guéris................................................................50
Morts de leurs blessures….........................................42
Restant à l’Hôtel Dieu en traitement……………….36
Total..........................................................................218
Individus tués sur place ou morts de leurs blessures, du côté des insurgés, 132
Soldats et officiers tués sur place ou morts de leurs blessures, 155. »
(Monfalcon en fait n’est guère précis. Compte tenu que les blessés côté insurgés ont dû souvent être soustraits aux autorités, on peut communiquer comme chiffre : Plus de 300 morts.)
Témoignage d’Eugène Bonnet écrit le 22 avril 1834 :
« Je suis arrivé à bon port comme vous devez le présumer et je n’ai rien eu de plus pressé en mettant le pied à terre que d’aller m’assurer de mes propre yeux de ce que la rumeur publique nous avait déjà appris. Je ne m’attendais certainement pas à trouver de dégats. Le feu et la mitraille ont rendu hideux l’aspect de certaines rues. Dans celle de l’hôpital, les débris de deux maisons incendiées fument encore et depuis les Terreaux jusqu’à Bellecour, la plus grande partie des rues est disloquée. Partout on marche sur les débris des vitres qui dans beaucoup d’endroits ne sont pas encore remplacées. A mon arrivée, les dragons bivouaquaient encore sur la place de Bellecour, où une grande partie des arbres ont été coupés pour faire du feu. Partout les maisons sont criblées de balles. Tout enfin annonce ici le lendemain d’une révolution. A l’hôpital civil, il y a maintenant plus de 150 blessés et peut-être davantage à l’hôpital militaire. On compte à peu près 300 à 400 morts. »
Dernier article de l’Echo de la Fabrique :
« monsieur,
Les événements douloureux dont notre ville vient d’être le théâtre, et le procès dirigé contre l’Echo de la Fabrique ont rendu extrêmement critique la position de ce journal, qui néanmoins a rendu d’immenses services aux classes travailleuses, et bientôt peut-être sera leur unique refuge, la seule voix pour laquelle ils puissent faire entendre leurs griefs et exprimer leurs besoins.
Vous l’avez sans doute compris comme nous, monsieur, et comme nous vous êtes convaincu que sous l’application de la loi contre les associations, votée naguère par la Chambre des députés, adoptée par celle des pairs et enfin sanctionnée par le roi ; vous avez compris, disons-nous, que désormais les travailleurs cesseront de pouvoir se réunir et se concerter, et que dès-lors, plus que jamais, ils sont intéressés à se conserver une tribune qui les sauve du malheur incommensurable dont ils sont menacés avec nous dans l’existence de l’Echo.
Dans sa situation toute critique, l’Echo de la Fabrique, auquel le présent et l’avenir des travailleurs est intimement lié, entravé dans le cours de ses publications par les motifs que nous venons de vous indiquer, sent vivement le besoin d’être appuyé dans sa marche par un cautionnement qui le mette à même de traiter non des matières politiques, mais bien des matières industrielles auxquelles se rattachent les questions de travail, de salaire, etc., droit dont on veut nous spolier et qu’il faut revendiquer à tout prix.
Nous pensons, monsieur, que vous aurez compris la gravité des motifs que nous offrons aujourd’hui à vos méditations sérieuses, et que nous n’aurons pas compté en vain sur votre concours pour les besoins nouveaux qu’il importe de satisfaire, si l’on ne veut se mettre à la merci des oppresseurs de la grande famille des travailleurs.Lyon, le 20 avril 1834. »
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